C’était mon refuge à moi ; révélé à personne. Pas même à mes sœurs pourtant complices quotidiennes de nos jeux d’enfants. Il m’accueillait par temps chaud d’été.
Je l’avais découvert en cueillant des petites fraises. Difficile de dire quel âge j’avais. Peut-être six ans? Pas plus. En fait, ce n’était pas loin de la maison. Juste de l’autre côté du pâturage, adossé à la clôture en pieux de cèdres séparant notre propriété de celle du voisin. Mon petit nid s’inclinait au soleil vers une petite rigole roucoulante en contrebas.
J’avais plaisir de m’y allonger dans l’herbe chaude et d’écouter la musique de la nature! Une vie active s’animait autour de moi telle une symphonie inachevée. Une sauterelle dérangée par ma présence cliquetait en se sauvant. Une abeille tourbillonnait d’allégresse au dessus des trèfles gorgés de nectar. Tiens, un papillon jaune folâtrait autour d’une marguerite. Il ne manquait plus qu’une libellule gracieuse pour venir saluer la demoiselle que j’étais! En revanche, un colibri s’amenait faire du surplace devant mon regard.
D’autres bestioles plus impressionnantes osaient parfois me faire sursauter. Une grenouille coquette attirait mon attention par son coassement. Un mulot furtif filait à toute vitesse vers un autre repaire.
Chaque fois c’était un spectacle différent, une nouvelle chorégraphie que je gardais jalousement pour moi seule.
Ces moments privilégiés au soleil d’été demeurent à jamais le souvenir le plus poétique de mon enfance. J’en entends encore les vibrations, j’en hume toujours les odeurs et en perçois les couleurs.
Si on me demande d’évoquer un lieu paradisiaque, c’est à mon refuge que je pense. Je lui dois de m’avoir appris le côté bavard du silence, la vie autour d’un brin d’herbe et la beauté qui n’aspire qu’à être contemplée.
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